Que faire face à un séisme politique mondial ? Les structures géopolitiques qui ont façonné notre pensée et guidé nos actions depuis 1945 se sont modifiées sous un double effet : d'une part celui de la brutalité de la Russie poutinienne alliée aux pires régimes de la terre, et d'autre part les conséquences des élections américaines portant démocratiquement au pouvoir un président ignare, grossier et entouré d'une oligarchie qui piétine le droit, notamment international.
Le projet de vider Gaza de ses habitants pour y construire une Riviera, l'entrave aux travaux scientifiques par des restrictions idéologiques, l'abandon de l'accord de Paris sur le climat, et maintenant les insultes abjectes à un dirigeant européen, reprenant le narratif russe, pour le contraindre à une paix sans garanties de sécurité. On est effaré, plusieurs fois par jour, de voir franchies les limites qui fixaient un cadre, certes perfectible, à l'action internationale, et préservaient l'humanité de la seule loi du plus fort.
Que faire face à un Donald Trump qui entame une entreprise d'intimidation contre les états- membres de l'Union européenne à coups de droits de douane, et qui annonce abandonner le soutien militaire à l'Ukraine, au risque de légitimer de nouvelles attaques contre l'Europe ?
D'abord ne pas avoir peur, ni douter. L'Europe représente 450 millions d'habitants et 17000 milliards d'euros de PIB. Sa mémoire collective est marquée par les guerres en son sein ou à ses frontières, ce qui lui donne la lucidité de rechercher une paix juste et durable.
Ensuite, l'Europe doit s'engager, en mobilisant ses ressources industrielles et technologiques pour assurer sa défense et celle des états de son voisinage : Ukraine, Moldavie, Arménie. Le périmètre du Conseil de l'Europe est le plus adapté à cette situation inédite, permettant d'inclure le Royaume- Uni, la Suisse, la Norvège, et pourquoi pas la Turquie, à certaines conditions, dans cette nouvelle configuration.
Enfin, cette Europe élargie doit assurer sa souveraineté alimentaire, numérique, énergétique et technologique, y compris militaire, pour limiter sa dépendance aux États-Unis.
Face à une crise historique, nous demandons aux dirigeants de cette Europe élargie d'unir leurs forces et d'agir en ce sens. Les corps intermédiaires, les médias et les citoyens européens devront aussi jouer leur rôle pour soutenir la résistance aux nouveaux impérialismes.