Ah, le vieux rêve de la droite dure… Supprimer les aides aux parents des délinquants, les frapper au portefeuille, parce que « il n’y a que ça qu’ils comprennent, ces mauvais parents » et pendant qu’on y est, priver aussi les frères et sœurs, selon le bon vieil adage « Si ce n’est toi, c’est donc ton frère. »
Eh bien non ! C’est une mauvaise idée, un effet d’annonce aussi inefficace qu’injuste car contraire á l’intérêt supérieur des enfants et non conforme aux principes du droit.
Liés à l’engagement dans la délinquance, le plaisir de la transgression, le sentiment d’impunité, le phénomène de bande et l’attirance envers l’argent facile caractérisent l’immaturité de certains mineurs, que corrigent l’éducation, les politiques publiques, les influences diverses. L’enfant est un être en pleine croissance, caractérisé par sa jeunesse, sa vulnérabilité, son manque d’autonomie. Aussi la loi a consacré des droits spécifiques faisant primer l’intérêt supérieur de l’enfant (en matière d’accompagnement social, d’éducation, d’accès aux loisirs etc.), proclamés par la Convention internationale des droits de l’enfant en son article 3-1.
La privation de droits est encadrée par des principes -constitutionnels- qui s’imposent à tous, afin d’éviter toute sanction arbitraire. Ainsi, le principe de personnalité des peines empêche de sanctionner une personne pour un fait qu’elle n’a pas elle-même commis. En clair, une sanction collective est contraire au droit. Si vous êtes un enfant modèle dans une fratrie de moutons noirs, vous ne sauriez être puni à leur place. Si, comme parent, votre rejeton défie votre autorité et vous violente, vous ne devriez pas être enfoncé dans vos difficultés par une sanction financière.
Par ailleurs, le Conseil Constitutionnel prévoit la nécessité d’un lien de réglementation entre la personne sanctionnée et l’autorité administrative. Ainsi, il est illégal de priver quelqu’un d’un tarif social à la cantine ou d’aides pour l’accès à la culture s’il a commis une incivilité ou un trouble à l’ordre public sans rapport avec le restaurant scolaire ou le lieu culturel. Cela n’empêche pas des villes ou des élus nationaux de revenir régulièrement sur cette fausse bonne idée.
En 2020, la Ville de Valence a délibéré en ce sens, son maire bénéficiant alors d’une forte médiatisation, avant d’être beaucoup plus prudent lorsqu’il s’est agi de passer aux actes.
Cités par le journal La Croix, des chercheurs du CNRS tels que Gérard Mauger ou Virginie Donier avaient pointé les risques d’illégalité de ces mesures, leur absence d’efficacité, et leur effet contre-productif sur les familles en grande précarité : déjà démunies, elles donneront encore moins accès à leurs enfants aux services de cantine, à l’accès à la culture, au sport, bref à une socialisation susceptible de remettre les enfants dans le droit chemin.
Par ailleurs, saisie par En Commun!, la Défenseure des Droits avait à cette occasion rappelé quelques principes du droit : l’intérêt supérieur de l’enfant doit primer, les peines doivent être personnalisées, la sanction doit être proportionnelle à la faute commise. Enfin, la Défenseure des Droits rappelait la nécessité du débat contradictoire, donc du droit à la défense pour la personne mise en cause.
En février 2025, ce débat revient à la faveur d’une proposition de loi des Républicains. En Commun ! rappelle son opposition à toute proposition inconstitutionnelle et n’allant pas dans le sens de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Mireille Clapot
Membre du bureau d’En Commun !
Députée de la Drôme de 2017 à 2024